La micro-mobilité partagée italienne en pleine croissance !

 
La bicicletta somiglia, più che ad ogni altra macchina, all’aeroplano: essa riduce al minimo il contatto con la terra, e soltanto la sua umiltà le impedisce di volare.
— Mauro Parrini

L’Italie, mondialement reconnue pour sa culture, sa richesse gastronomique et ses paysages à couper le souffle, est également une terre de cyclisme. Souvent cantonné au sport, depuis quelques années le vélo s’invite durablement dans les habitudes de mobilité des italiens. Et la trottinette électrique aussi ! En effet, la micro-mobilité ne cesse de croître dans les villes italiennes. À ce titre, le nombre de systèmes de micro-mobilité, comprenant les vélos et les trottinettes, est en constante augmentation : + 25% entre 2020 et 2021 ! Cette tendance s'inscrit dans la lignée de la croissance mondiale de la micro-mobilité, alimentée par les préoccupations environnementales et les changements des modes de déplacements des citadins vers des mobilités plus vertes. Dans cet article, Qucit revient sur les raisons de cet essor de la micro-mobilité partagée en Italie.

Source : Gazzetta

Quelle est la culture du vélo en Italie ? 

Si l’Italie est souvent associée aux voitures sportives ou aux petites citadines, le vélo y occupe une place de plus en plus importante. Une des raisons ? Le sport ! En effet, le cyclisme sportif a considérablement ancré le vélo dans la société italienne, allant même jusqu’à le considérer comme un symbole de son identité. Le cyclisme est l’un des sports les plus populaires en Italie, avec une longue tradition et une riche histoire. Le pays accueille le Giro d’Italia depuis 1909 qui est l’une des trois plus grandes courses de cyclisme au monde aux côtés du Tour de France et de la Vuelta a España.  De plus, l'Italie a une longue tradition de fabrication de vélos de haute qualité, avec des marques de vélos de course parmi les plus renommées au monde telles que Colnago, Bianchi et Pinarello.

Source : Cycling Archives

Les Italiens sont ainsi connus pour leur passion du vélo dans leurs loisirs mais aussi comme moyen de transport ! En 2011, pour la première fois depuis 1964, les ventes de vélos dépassaient celles des voitures. Cette “bicimania” s'expliquait en partie par la crise économique qui touchait de plein fouet les ménages italiens et l’augmentation exponentielle du prix du carburant. Une situation qui n’est pas sans rappeler le contexte actuel… Cet engouement pour le vélo, et plus largement pour la trottinette, a trouvé un second souffle durant la crise sanitaire de 2020. En effet, nombreuses ont été les villes à promouvoir les véhicules de micro-mobilité pour améliorer la mobilité urbaine en réduisant la surcharge des transports publics pour limiter les contaminations. Ainsi,  Milan, épicentre de l’épidémie de coronavirus en Europe, avait mis en place de 35 km de nouvelles pistes cyclables, agrandi les trottoirs et fixé la vitesse maximale des véhicules à 30 km/h dans le centre-ville pour encourager l’usage des véhicules de micro-mobilité.

Pourquoi parle-t-on d’essor de la micro-mobilité en Italie ?

Selon Il Rapporto Nazionale sulla Sharing Mobility de 2022, en 2021 les déplacements en micro-mobilité comptabilisaient 26 millions de locations.

Source : Rapporto Nazionale sulla Sharing Mobility de 2022

Le nombre de services de partage de la micro-mobilité était de 146 en 2021, ce qui a engendré un autre aspect positif : la diffusion de la micro-mobilité vers les villes du Sud. Pour la première fois depuis le suivi de ces activités, le nombre de capitales provinciales disposant d’au moins un service de micro-mobilité partagée (62) est plus élevé que celles ne disposant d’aucun service (46). 

Source : Rapporto Nazionale sulla Sharing Mobility de 2022

À ce titre, Milan et Rome sont les deux villes où l’offre et la demande de services de micro-mobilité sont les plus fortes.

  • Rome, la capitale italienne, a récemment réorganisé son offre de trottinettes partagées. Dans le but d’encadrer au mieux l’utilisation de ce moyen de transport, la municipalité a décidé d’abaisser la vitesse des engins de 25 km/h à 20 km/h et de réduire le nombre d’opérateurs de trottinettes de 7 à 3. 

  • La ville de Milan dispose d’un service de vélos en libre-service, BikeMi, depuis 2008. Opérés par ClearChannel, ces vélos partagés sont disposés dans 320 stations aux quatres coins de la ville, permettant aux utilisateurs de se déplacer à leur guise tout en remettant les vélos dans les bornes dédiées.

Source : In Italia Magazine

Une étude du cabinet McKinsey, Why micro-mobility is here to stay, réalisée en 2021 démontre que cette tendance de la micro-mobilité n’est pas prête de s’arrêter. En effet, en Italie, 81% des répondants seraient prêts à utiliser un véhicule de micro-mobilité pour se rendre sur leur lieu de travail. Le pays se hisse ainsi à la deuxième place du classement, juste derrière la Chine (86%), et montre une nette préférence pour les vélos électriques et mécaniques. Cette tendance se traduit également sur le territoire italien puisqu’en 2023, l’Italie compte 65 systèmes de vélos en libre-service !

Source : McKinsey, Why micromobility is here to stay, Dec 2021

L’exemple de Brescia 

Brescia est un exemple de ville italienne ayant implanté un système de micro-mobilité très tôt. En effet, depuis 2008, cette ville de Lombardie propose un service de vélos partagés à ses habitants. Aujourd’hui, ce service compte 450 vélos mécaniques et électriques répartis sur 93 stations. Et sa popularité ne cesse de croître ! En 2022, l’opérateur Brescia Mobilità a annoncé une augmentation de 10% de ses abonnés, portant ainsi leur nombre à 34 000. 700 000 trajets ont été réalisés avec le service Bicimia sur l’année 2022. 

Source : Bicimia

Pour faire face à cette popularité grandissante, Brescia Mobilità a fait appel à Qucit pour optimiser les opérations de rééquilibrage du système. La question du rééquilibrage est essentielle pour la gestion d'un système de micro-mobilité. Un système n'est jamais parfaitement équilibré de manière naturelle. Certaines zones sont principalement des zones de départ et d'autres des zones d'arrivée.  Au cours du temps, les comportements des utilisateurs peuvent changer, ce qui rend nécessaire de réévaluer continuellement ces stratégies. Qucit aide ainsi Brescia Mobilità à augmenter le taux d’utilisation des vélos en libre-service tout en optimisant les déplacements pour collecter et déposer le bon nombre de vélos dans les stations.

Quelles sont les raisons du développement de la micro-mobilité en Italie ?

Le fort développement de la micro-mobilité en Italie s’explique par plusieurs facteurs. En premier lieu, la conscience environnementale des Italiens est de plus en plus prégnante. Selon une enquête réalisée par Ipsos en 2021 pour les Dialogues franco-italiens pour l’Europe, le niveau de sensibilité quant à l’urgence d’intervention serait plus élevé chez les Italiens (81%) que chez les Français (72%).

De plus, du fait de l’étroitesse des rues, de l’augmentation des zones piétonnes ainsi que de la congestion du trafic, les solutions de micro-mobilité dans les villes italiennes offrent une alternative bienvenue à la voiture. Enfin, l’arrivée des opérateurs de flottes privées a permis à de nombreuses villes italiennes de se doter de nouveaux systèmes de véhicules partagés sans avoir à supporter l’intégralité de leur investissement.

Y-a-t-il des freins persistants au développement de la micro-mobilité en Italie ?

Il existe encore des freins à l’expansion de la micro-mobilité. Parmi eux, la sécurité routière de tous les usagers. En moyenne, un Italien parcourt moins de 100 km par an à vélo, contre 1100 km pour un Néerlandais, mais s’expose à cinq fois plus de risques d’avoir un accident.

Source : PATH Make way for walking and cycling, 2021

En effet, en 2021, 10% des accidents de la route avec dommages corporels impliquaient des cyclistes. 207 d’entre eux y ont perdu la vie. Le manque d’infrastructures cyclables, le non-respect du code de la route ainsi qu’une législation ayant longtemps oublié le vélo ont engendré cette forte exposition des cyclistes au risque. 

Cependant, depuis quelques mois, il y a du changement. En août 2022, le ministère italien des Infrastructures Durables et de la Mobilité a dévoilé le « Piano generale della mobilità ciclistica” (Plan général de la mobilité cyclable). Portant sur la période 2022-2024, ce plan vélo, prévu par une loi de 2018 qui définissait notamment les pistes cyclables comme des infrastructures d’intérêt national, présente la planification à long terme pour améliorer et renforcer les infrastructures cyclables sur l’ensemble du territoire italien. L’objectif premier est de promouvoir la pratique du vélo sur l’ensemble du territoire en augmentant notamment la sécurité des cyclistes. De cette façon, le plan prévoit d’élargir le réseau cyclable italien Bicitalia à 20 000 km, d’inciter les grandes villes à se doter d’un Biciplan, d’atteindre une part modale du vélo de 20% dans les villes métropolitaines, d’augmenter la densité d’infrastructures cyclables en ville jusqu’à une valeur moyenne nationale de 32 km pour 100 km2 (contre 23,4 km en 2019) et de développer les systèmes de vélos en libre-service. Avec un budget de 1 154 millions d’euros, ce plan se veut très ambitieux et place enfin le vélo comme un mode de transport à part entière.

 
Raphaël CHERRIER