Le vélo partagé en Finlande

La Finlande est un pays fascinant et un réel modèle européen sur bien des plans : éducatif, financier ou climatique. La question du transport n’est pas une exception. En effet, la Finlande se distingue par son approche innovante en matière de micromobilité. Le pays mise sur un système de transport multimodal durable. C’est pourquoi les autorités finlandaises ont mis en place des politiques favorisant l'utilisation de véhicules légers modernes, tels que les trottinettes et les vélos électriques, en les combinant efficacement avec les services de mobilités tels que les transports en commun. 

Au cours de l'automne 2024, Qucit a eu l’opportunité d’échanger avec plusieurs collectivités finlandaises afin de comprendre leurs politiques en matière de mobilité durable, leurs initiatives autour de la pratique du vélo ainsi que les défis qu’elles peuvent rencontrer sur leur chemin vers un avenir plus vert. C’est dans cet article rassemblant leurs témoignages, que nous vous invitons à découvrir : Le Vélo Partagé en Finlande.

 

La Finlande, un pays tourné vers la mobilité douce 

La Finlande est-il un pays précurseur en termes de micro mobilité partagée  en Europe ? Pour répondre à cette question, Qucit a étudié le contexte politique, socio-environnemental et économique du pays.  

Tout comme de nombreux pays européens et internationaux s’engageant à atteindre des objectifs en matière de respect de l’environnement, la Finlande ne fait pas exception. En effet, le pays a mis en place plusieurs stratégies pour réduire son empreinte carbone, notamment dans le secteur des transports.
En 2011, le pays avait d’ores et déjà publié une stratégie nationale pour la marche et le cyclisme, visant à promouvoir la mobilité active comme moyen de transport quotidien. Le gouvernement avait alors accompagné cette stratégie d’un plan d’action national pour la marche et le cyclisme jusqu'en 2020.  

C’est dans la continuité de cette politique qu’en mai 2021, le gouvernement a adopté une décision de principe visant à réduire de moitié les émissions de gaz à effet de serre des transports domestiques d'ici 2030. Cet objectif a été fixé par rapport aux niveaux de 2005, qui s’élevaient à l’époque à 80 millions de tonnes de CO2 émis. Ce plan, connu sous le nom de "feuille de route pour un transport sans combustibles fossiles", se déploie en trois phases et vise à atteindre des transports à émissions neutre (soit 0%) d'ici 2045.
Cette ligne directrice politique s’inscrit parfaitement dans les enjeux sociaux et environnementaux de l’ère du temps. Elle a également pour but de réduire la dépendance à l’automobile, d’améliorer la qualité de vie urbaine ainsi que faciliter l’accès économique à la mobilité pour la population finlandaise, qui n’échappe pas à l’inflation économique mondiale de ces dernières années. En 2023, la Finlande avait atteint un taux d’inflation à 6,25%

Ainsi, certaines municipalités ont développé des infrastructures cyclables de qualité et des programmes de sensibilisation pour encourager les citoyens à utiliser le vélo comme alternative à la voiture. Comme le souligne Jere Sipponen - Chef de Projet pour la ville de Turku “en termes de politique relative au respect de l’environnement, le pays souhaite atteindre 63% de voyages effectués en transport en commun d’ici 2030.” En complément, pour réduire les émissions de CO2, de nombreuses initiatives locales sous forme de systèmes de vélos partagés furent mises en place pour faciliter l’accès au vélo auprès des populations. Qucit est donc allé à la rencontre des collectivités de Turku, Helsinki, Tampere et Lahti afin de partager leurs initiatives innovantes autour de la mobilité active.

 

Interview de plusieurs collectivités locales finlandaises sur le TLS

À la suite de nos échanges avec les collectivités d’Helsinki, Turku, Tampere et Lahti, nous n’avons pu nous empêcher d’observer une ligne directrice commune à toutes ces villes finlandaises : la micro mobilité partagée! 

Conscientes des enjeux climatiques, et du besoin d’amélioration de la qualité de vie en ville, les modes de transports partagés habituels doivent être diversifiés. C’est pourquoi, en complément des bus, trains et éventuels tramways, ces collectivités ont toutes mis à disposition de leurs habitants des services de trottinettes et vélos partagés. Ces systèmes sont en service saisonnièrement, généralement d’avril à octobre, pour fermer et être maintenus durant la période hivernale. 

Comme l’observe Miikka Kulpakko - Chargé de mobilité trottinettes électriques pour la capitale Helsinki, “les trottinettes électriques, étant plutôt fournies et gérées par des opérateurs privés comme Tier, Lime ou Dott, sont très populaires auprès des habitants. Ce type de véhicule est apprécié pour sa rapidité, sa facilité d’usage (sans efforts pour l’usager) et sa flexibilité grâce à sa technologie “free floating” permettant une plus grande liberté aux usagers pour emprunter ou rendre un véhicule après un trajet.” De plus, les systèmes de trottinette en libre service restent ouverts un peu plus longtemps, de mars à novembre, et comportent souvent une plus grande flotte que les vélos: 3 000 TLS à Lahti, 6 000 TLS à Tampere et 10 000 TLS à Helsinki. Ainsi, en 2023, à Helsinki, ont été recensés 3,5 millions de trajets pour les trottinettes électriques contre 2 millions de trajets pour les city bikes. 

Toutefois, cher lecteur, ne vous méprenez pas! Chaque système porte son lot d’avantages et d’inconvénients. De cette façon, les TLS étant des systèmes privés, leur prix est respectivement plus élevé que celui du Vélo en Libre Service. De plus, dépendant du marché privé et ayant une perception peu sûr, propice aux accidents lors de l’usage, les villes tendent à préférer le VLS et imposer une régulation pour restreindre les TLS. Jere Sipponen - Chef de Projet pour la ville de Turku nous a confié que  “par le passé, par exemple, de nombreuses trottinettes ont dûes être repêchées dans l’Aura (fleuve traversant Turku), alors qu’aucun vélo partagé n’a eu ce problème.”
Par conséquent, comme nous le dit Jukka Uusitalo - Planificateur du trafic cycliste pour la ville de Tampere  “bien que les TLS soient plus populaires que les VLS, le gouvernement souhaiterait faire passer une législation, pour modifier la politique actuelle de liberté commerciale, afin de mieux contrôler les systèmes de TLS, perçus comme dangereux pour la population. Cette législation aurait pour but d’imposer une limitation de vitesse pour les TLS, encore inexistante dans certaines villes, ou encore d’empêcher certains usagers de rouler à deux sur une même trottinette.” 
Mais alors, qu’en est-il du vélo ?

 

Interview de plusieurs collectivités locales finlandaises sur le VLS

Comme introduit précédemment, ces quatre collectivités que sont Helsinki, Tampere, Lahti et Turku, ont toutes un système de vélos partagés. Leur taille varie en fonction du nombre d’habitants et de la zone couverte par le système. En effet, à Helsinki, une politique de système régional de vélos partagés est actuellement en cours de construction pour favoriser au mieux l’usage du vélo comme alternative à la voiture. De fait, lorsque le service de vélos urbains actuel d'Helsinki a démarré en 2016, le réseau comprenait 50 stations de vélos et 500 vélos de ville. Depuis lors, le service a été progressivement étendu pour couvrir presque toute la région d'Helsinki. Heiska Ilari - responsable du service de vélos partagés de la capitale Helsinki nous a expliqué que “le prochain système de vélos partagés d’Helsinki permettra aux usagers de traverser les frontières communales avec des vélos de ville unifiés entre Helsinki et plusieurs autres communes alentours : Espoo, Vantaa, Kauniaisten kaupunki (cité des beautés), Kerava, Commune de Sipoo et commune de Siunti.” 

Les systèmes de VLS des villes Turku (700 vélos mécaniques et 70 stations), Tampere (700 vélos mécaniques et 113 stations) et Lahti (500 e-bikes et 60 stations) sont quant à eux, plus petits mais ne perdent pas pour autant en termes d’usage. La perception des systèmes de vélos partagés est très positive en Finlande, en témoigne parfaitement l’exemple de Lahti, observant une croissance constante du nombre d'usages. Juhana Polojärvi - Ingénieur de la circulation cycliste pour la ville de Lahti nous fait part de la success story de sa ville qui, “après avoir doublé sa flotte par rapport à 2022 (250 e-bikes et 31 stations), le nombre total de trajets réalisés en vélos est ainsi passé de 110 000 trajets cette année-là, à 290 000 trajets en 2023, puis à 330 000 trajets en 2024 !”
Mais alors, qu’est-ce qui rend le vélo aussi attractif ?

Tout d’abord, les villes finlandaises sont généralement dotées d’une infrastructure de qualité, les pistes cyclables sont séparées des routes, bien qu’encore partagées avec les piétons. Ensuite, les systèmes sont accessibles en termes de prix. Par exemple à Turku, le système, entièrement financé par la ville, permet aux habitants ayant un abonnement aux transports en commun, d’avoir accès gratuitement aux vélos partagés. Certaines villes, dont Turku, commencent également à diversifier leur flotte de véhicules en proposant des “programmes test” pour intégrer des vélos cargos au sein de leur système de VLS, grâce au financement de ces projets par l’Union Européenne. Ainsi, après avoir lancé un premier programme test de 3 vélos cargo en 2023, la ville de Turku a désormais pu lancer un second programme test en 2024 avec 7 vélos cargos. 
En Finlande, plusieurs entreprises proposent à leurs employés en CDI une réduction à l’achat d’un vélo afin d’inciter la mobilité active dans les déplacements du quotidien. Enfin, des associations cyclistes comme la Finnish Cyclists’ Federation promeuvent le vélo comme mode de transport et organisent des événements comme la cycling week en mai pour rassembler et animer une communauté autour du cyclisme. 

Toutes ces démarches en faveur de la mobilité partagée rendent les villes plus vertes. Turku compte ainsi 10% de part modale du vélo, Helsinki 12% et Tampere 9%.

 

En conclusion, la Finlande continue de progresser vers une mobilité plus durable et inclusive, en intégrant pleinement la micromobilité dans son paysage urbain. Bien que des défis subsistent, notamment en ce qui concerne l'adaptation des infrastructures aux conditions climatiques rigoureuses et la nécessité d'une réglementation adaptée pour assurer la sécurité de tous les usagers. Il est du rôle de chacun d’entre nous, y compris vous cher lecteur, où que vous vous trouviez, à notre échelle, de prendre part à cette intégration de la mobilité active dans nos coutumes, afin de construire un monde plus vert pour demain. 

Suite au prochain épisode, qui nous fera voyager sous le soleil d’Italie, pour comprendre la mobilité partagée du sud de l’Europe !